Poussins morts et sirène dangereuse
Autant être clair dès le départ : devenir riche exigera de vous débarrasser de toute sensiblerie. Si vous n’êtes pas capable de mettre à mort quelques poussins innocents sans verser une larme, vous ne serez jamais riche. Ceci étant posé, continuons :
Le sacrifice de sept poussins pour devenir riche est une pratique très connue dans notre pays.
“Notre pays”, c’est-à-dire le Bénin (« moi grand marabout DJOGBE du benin (sorcier noir) je peux faire de vous des heuereux »). C’est quand même malheureux de constater que, dans un pays comme la France, réputé développé, prospère et instruit, les citoyens ignorent tout de ces petites astuces simplissimes qui vous mettent à l’abri du besoin sans trop d’effort. Notre système éducatif doit être revu de fond en comble.
Ensuite, ce qui reste compliqué à expliquer, c’est pourquoi le Bénin pointe seulement à la 140ème place (sur 196) du classement des pays par ordre de richesse. Peut-être que, après tout, les Béninois n’ont pas tous 7 poussins sous la main... ? Peut-être que, finalement, le sortilège n’est pas aussi simple qu’il y paraît…... ? Peut-être que les Béninois mentent dans les sondages de prospérité... ? Voyons la suite...
les esprits ont une apparence mi-homme mi-poisson,mais ils sont comme tous les esprits capable de changer votre vie.
Effectivement, ça se complique. Voilà qu’interviennent des esprits mi-hommes, mi-poissons. Leur description évoque fortement celle de nos familières sirènes, mais ça n’a peut-être aucun rapport. Les esprits béninois ont peut-être des jambes humaines et une tête de poisson. Ou peut-être qu’ils sont poissons sur la moitié gauche du corps, et humains sur la droite, ou vice versa. Moyennant quoi, ça reste surprenant qu’ils aient une apparence quelconque, s’ils ne sont que purs “esprits”. Mais ne nous laissons pas aveugler par nos préjugés culturels, et gardons l'esprit ouvert à l'inconnu.
Ces esprits sont beaucoup utilisé pour créer des pouvoir d’attirance physique,de richesse démesurée,d’acquisition d’un grand poste.
“Attirance de richesse démesurée”, on n’en demande pas tant : une richesse convenable nous suffirait déjà bien. Mais qui peut le plus peut le moins : nous voilà donc rassurés.
Vous vous rendez à la plage un soire au moment ou il n'y a plus personne pour vous gener dans votre rituel.
Là, ça commence à se compliquer pour de bon. En plus des 7 poussins, il faut avoir sous la main une plage en bord de mer. Remarquez, on aurait pu s'en douter, car le titre du rituel annonçait : « SACRIFIER 7 POUSSINS A LA MER POUR DEVENIR RICHE. ».
Et en plus, il faut aller à la plage à un moment où il n’y a personne – et surtout à un moment où il n’y a pas de militants de la cause animale qui prennent le soleil, car ils pourraient s’émouvoir de l’égorgement de poussins. Déjà, ça élimine d’emblée toute la Côte d’Azur surpeuplée, et en particulier Saint Tropez, où vous verriez surgir de l’eau, non pas une sirène, mais une Brigitte Bardot qui vous arracherait la tête avec ses dents.
Bref, peut-être qu’au Bénin les plages sont plus désertes. Mais j’en doute, parce que, probablement, tous les Béninois doivent passer leur temps à la plage avec des poussins morts pour garantir leur propre aisance matérielle. Moyennant quoi, si tout le monde le fait au Bénin, on a quelque chance de passer inaperçu lorsqu'on y va soi-même. Bref, la conclusion s'impose d'elle-même : rendez-vous au Bénin pour effectuer votre petit rituel sanguinaire.
Vous sacrifiez les 7 poussins à la mer, et vous jetter les poussins mort à la mer
On vous avait prévenu : pour être riche, il faut être cruel et insensible. En plus, quoi de plus mignon que des poussins, avec leurs grands yeux innocents, leur duvet soyeux et leurs petits piaillements aigus ? Encore, s'il fallait sacrifier des limaces, des méduses, ou des acariens, passe encore. Mais des poussins !
En vérité, je vous le dis : on n'a rien sans rien. Croyez-vous vraiment que Donald Trump soit devenu milliardaire par amour de l’humanité et des poussins ? Évidemment non. Le jaune des poussins innocents a fini par déteindre sur son improbable coiffure, qui trahit de ce fait la source réelle de sa fortune personnelle.
Puis, vient un moment ou le vent deviendra plus violent,et les vagues plus tenaces,et tel un éclair,vous verrez jaillir de l’eau,une charmante jeune dame mi-poisson apparaitra
Quoi ?! Mais que se passe-t-il ? On croyait être en train de lire une recette de sortilège gentillet (quoique potentiellement gore) et on bascule en plein Harry Potter, au milieu des Pirates des Caraïbes ! Jeter des poussins morts à la mer ferait sortir instantanément des sirènes de l’eau ? Mais pourquoi on n’est pas au courant ?! La Grande Conspiration Mondiale nous cache des trucs de dingue !
ne paniquez pas ,il ne peut rien vous faire,car par l’huile et les nombreux talismans que vous possédez(que je vais vous envoyer par DHL) vous serez extraordinairement protégé.
C’est-à-dire que la “jeune dame mi-poisson” est “charmante”, mais apparemment aussi dangereuse et malfaisante. Moi, je n’aurais même pas pensé à paniquer, ni à me protéger. Mais heureusement, M. DJOGBE est là pour nous prévenir et nous prodiguer ses “huiles” et “nombreux talismans”, qu’il va nous “envoyer par DHL” (c’est fou comme des détails logistiques aussi triviaux arrivent à se glisser au beau milieu d’une histoire aussi magique et merveilleuse).
Donc, ça se complique encore : il faut des huiles et des talismans. Avant d’être riche, il faudra donc probablement lâcher quelques centaines d’euros à M. DJOGBE. Mais ça n’est pas bien grave, puisqu’on sera riche juste après.
“il ne peut rien vous faire”... “il”... la sirène, la “charmante jeune dame” ? Mi-femme, mi-poisson… Mi-femme, mi-homme, aussi ? On n’est plus à ça près.
Poursuivons...
Pendant que la femme apparaît, vous devez la regarder dans les yeux.
OK, ça paraît faisable, non ? Pas la partie la plus compliquée du rituel. Enfin, si elle a des yeux, bien sûr. Plus rien ne nous surprendrait, à ce stade.
Ensuite vous lui demanderez ce que vous voudrez.En général les gens demandent à être très riche très vite, j’en connais même qui ont demandé à devenir riche sur le champ !!!
Il y a des gens malins, tout de même. Moi, décontenancé par l’apparition surnaturelle, j’aurais sûrement demandé l’heure, ou une clope. Ou d'être riche mais seulement dans 10 ans.
arriver à la maison vous verrez votre chambre remplir de l'argent(euro, dollar), diamant et de l'or.Elle vous vient de vous donner une partir des richesses qui sont sous la mer. Ce rituel est très éfficace.
Tout cela est vraiment fascinant – et ça semble paraître tellement simple et naturel pour M. DJOGBE ! Est-ce que, lui aussi, se pose quelques questions d’ordre rationnel face à ce déluge de bienfaits surnaturels ? Faisons-le pour lui.
La sirène vous donne “une partie des richesses qui sont sous la mer”. On pensait bien qu’il y avait des richesses sous la mer, mais naïvement, on pensait plutôt aux produits de la pêche, aux hydrocarbures, ce genre de choses triviales.
Donc, M. DJOGBE nous donne l’exemple d’un petit malin qui demande à être riche immédiatement, et qui rentre chez lui pour trouver sa “chambre remplie d’argent (euros, dollars), de diamants et d’or”. La première question qui vient à l’esprit (le nôtre, pas celui qui est sorti de la mer), c’est : est-ce que les billets de banque sont mouillés ? La seconde question, c’est : quelle est leur provenance ? Une seule explication : les naufrages. Tout se tient : les sirènes sont connues pour faire naufrager les navires. Elles ont donc tout loisir de récupérer les richesses des épaves pour ensuite en disposer comme bon leur semble. Et les sirènes, ce qu’elles aiment par-dessus tout, c’est acheter des poussins morts par lots de sept. Depuis des siècles, tous ces récits terrifiants de marins emportés dans les abysses, c’était pour ça : pour des poussins morts. S’ils avaient su, les marins, il leur aurait suffi d’emporter à bord, en plus de leur marchandise, quelques caisses de poussins morts, et de les distribuer au gré des vagues, pour satisfaire le fétichisme poussinique des sirènes névrosées.
Nous disions donc, la sirène vous donne “une partie des richesses qui sont sous la mer”. M. DJOGBE ne le précise pas, mais on en déduit que, par exemple, un malade ne peut pas demander à une sirène de recouvrer la santé – à moins de penser que la santé des gens se trouve au fond de la mer. C’est donc un rituel certes puissant et “très efficace”, comme le garantit M. DJOGBE, mais pas non plus une panacée, malheureusement. Alors que se passerait-il si l’on s’avisait de demander à la sirène quelque objet non disponible au fond de la mer ? Par exemple, un synchrotron, ou une moussaka. Vous allez me dire, qui serait assez stupide pour demander un synchrotron ou une moussaka plutôt que la richesse, qui lui permettra ensuite de s’acheter tous les synchrotrons ou toutes les moussakas dont il a besoin ? Certes. Néanmoins, cela n’empêche pas de se demander, dans l’absolu, ce qu’il adviendrait en cas de requête impossible à satisfaire. La sirène vous rendrait les poussins morts en s’excusant poliment ? Elle replongerait au fond de l’océan et chercherait pendant l’éternité l’objet demandé ? Elle verdirait de rage et de vexation et vous arracherait la tête avec ses dents ? (ah non, ça c’est Brigitte Bardot) Ou au contraire, elle se mettrait en quatre pour faire chavirer au fond de l’océan un synchrotron ou un cargo rempli de moussaka.
Eh bien non, rien de tout cela.
Même si vous demandez à ces esprits quelque chose qui échappe à leur domaine de compétence,elles contacteront d’autres esprits pour vous satisfaire.
C’est mieux organisé que Pôle Emploi ou l’administration des impôts. Et on ne nous parle même pas de tout ça à l’école ! Quel gâchis...
Bon, imaginons maintenant qu’on ait besoin d’une voiture – qui n’en a pas besoin ? Pour peu que les sirènes aient fait chavirer un cargo transportant une cargaison de véhicules, elles pourraient disposer d’une confortable concession multi-marques au fond de l’océan. Néanmoins, au moment d’acquérir son nouveau véhicule, le client peut avoir quelques légitimes hésitations. Pourra-t-il choisir le modèle ? la couleur ? Et puis est-ce que le cuir des sièges et la ronce de noyer du tableau de bord auront bien résisté au séjour prolongé sous l’eau salée ? et la carrosserie aux hautes pressions des profondeurs ? Est-ce que le frottement des récifs coraliens n’aura pas laissé quelques éraflures disgracieuses sur les ailes ? Y a-t-il une garantie ? Est-ce que la sirène reprend mon ancien véhicule au prix de l’argus ?
Mais probablement faut-il se poser moins de questions, ne pas ergoter de la sorte, et plutôt se laisser porter par le bonheur de ce sortilège inespéré et surnaturel, à portée de main. Au pire, on pourra s'accommoder de quelques éraflures sur la carrosserie. À cheval donné on ne regarde pas les dents.
En définitive, l’ultime question qui vient à l’esprit, c’est : mais que peuvent bien faire les sirènes de tous ces poussins morts ?
Le scandale des poussins broyés
Ce document exceptionnel nous donne un éclairage nouveau sur le scandale des poussins broyés, dont vous avez sûrement entendu parler. Dans les fermes à volailles, on broie les poussins mâles vivants dès leur naissance, car ils ne savent pas pondre d'oeufs. Pourquoi est-ce un scandale ? Vous avez certainement votre idée sur le sujet : c'est très cruel de broyer de mignonnes petites créatures sans défense ; seuls les mâles sont broyés, la parité n'est pas respectée ; etc. Vous n'y êtes pas. Le scandale est ailleurs : si, au lieu de broyer ces poussins innocents, on les donnait à des nécessiteux, ces derniers pourraient ensuite aller les jeter à la mer et résoudre définitivement leurs problèmes économiques. Ce serait la fin de la misère dans le monde ! Rien de moins. Mais l'égoïsme de l'Occident n'a semble-t-il aucune limite : nous préférons toujours broyer les poussins plutôt que d'en faire bénéficier les moins chanceux que nous. À méditer...
Ce jour, en me connectant sur le site de Maître DJOGBE, la fenêtre de pub intrusive s’ouvre sur bonnes-affaires.pro, et me présente tout un topo sur un moyen étonnant de gagner de l’argent. Du coup, je m’attends à lire une solution à base de poussins morts jetés à la mer, mais à ma grande déception, ça parle plutôt de boursicotage. Je vous aurais bien fait un compte-rendu détaillé, mais le site en question se recharge régulièrement et affiche à chaque fois un contenu complètement différent… Décidément, le surnaturel est partout, avec Maître DJOGBE.